Je change de tête

Publié le par Emma

Je n'aime pas aller chez le coiffeur. C'est pour ça que je ne m'impose cette corvée que 2 ou 3 fois par an. J'y vais lorsque je ne ressemble plus à rien, et du coup, peu importe la tête que j'aurai en sortant, cela ne sera jamais pire que celle que j'avais en entrant.

Pourtant ma coffeuse, Angélique Clémence ou Matthias, est plutôt gentille. Elle me parle comme à une vieille dame un peu gâteuse, m'offre une boisson chaude et un magazine pour me faire patienter. Que je ne peux pas lire sans mes lunettes. Que je ne porte pas à cause de la teinture. Mais Angélique Clémence ou Matthias, toujours trés attentionnée me propose un étui protège-branches de lunettes. Que je refuse. Hors de question que je porte ce préservatif à lunettes, déjà les papillotes en alu pour les mèches sont du plus haut ridicule, j'ai vu des enfants passer devant la vitrine et me montrer du doigt en s'esclaffant...sale môme, va... n'aggravons pas la situation. Donc, je passe les 3 heures dans le flou le plus total.

Tout commence à l'entrée dans le salon. On me demande par qui je souhaite être coiffée. Je pense par la plus compétente histoire de pas être loupée, mais je m'entends répondre, choisissez cela m'est égal. Patate. Ce sera donc Angélique Clémence ou Matthias.

La première épreuve est le passage au bac des shampooings. On enfile une espèce de robe d'avocat, ça s'attache devant ou derrière, ils se fichent de moi, ça change à chaque fois. Et on s'installe. Les miracles de la technologie font que maintenant, sur le siège d'un coiffeur, vous vous sentez comme chez le dentiste. Du coup, instinctivement lorsque le fauteuil passe en position allongée, vous ouvrez la bouche. Trés sûrement étudié par des ingénieurs masculins, ce truc est censé nous aider à nous détendre. Jamais une femme n'aurait conçu un engin pareil. Comment se détendre en se demandant si on ne voit pas notre petite culotte si on est en jupe, si notre collant n'est pas filé, si la semelle de nos chaussures est propre ou si nos chaussettes ne tire-bouchonnent pas sur nos mollets quelque peu hirsutes.Ben oui, c'est l'hiver. D'autant que dans mon salon, le coin shampooing est contre la vitrine, et que je sens le regard goguenard envieux sur mes jambes de rêve du quidam qui passe.

Pour oublier le ridicule de cette position, j'écoute la conversation des shampouineuses. J'interviendrais bien pour dire que oui tout à fait d'accord avec Sophie, moi Cédric je l'aurais mis dehors à la première incartade, c'est rien qu'un beau salaud, ou que faut tenir bon le bébé qui pleure la nuit, ils finissent toujours par faire leur nuit. Mais d'une, cette conversation ne m'est pas destinée, et de deux, essayez donc de bavarder la tête en arrière, le regard au plafond avec les shampouineuses la tête en bas.

Angélique Clémence ou Matthias vous propose le produit miracle anti cheveux gras-secs-mous-raplaplas-frisottants, dont la lichette vous sera facturée au prix du litre du produit Parcequejelevauxbien, ou la mousse qui fait tenir le brushing (c'est quand même un peu le boulot du coiffeur de savoir faire un brushing qui tienne) et qui fera monter la facture totale à un nombre à trois chiffres. Non merci, moi je veux juste un shampooing et un aprés-shampooing. D'ailleurs mes cheveux sont propres, je les lave toujours avant, histoire d'éviter à Angélique Clémence ou Matthias de farfouiller dans une tignasse sale. Si j'avais une femme de ménage, je suis certaine que je ferai pareil: je ferai le ménage avant pour ne pas avoir honte. Donc, ce que j'économise en me passant de femme de ménage, je le dépense chez le coiffeur. CQFD.

L' épreuve du démêlage passée, les yeux encore plein de larmes, Angélique Clémence ou Matthias vous regarde avec sollicitude et  s'excuse de vous faire mal, elle va arrêter de tirer cette idiote sympathique coiffeuse, j'ai pourtant précisé que je craignais ça. Elle vous demande ce que vous souhaitez comme coiffure. L' expérience vous a appris que ce n'était pas la peine de se fatiguer à 1.essayer de lui expliquer ce que vous vouliez 2.essayer de ressembler à la fille du magazine, qui vous plait. Parce 1. Angélique Clémence ou Matthias ne fait jamais que ce qu'elle a envie de faire et 2. pour le service aprés-vente les réclamations faut les adresser à votre mère, vous ne ressemblerez jamais à la fille du magazine. Angélique Clémence ou Matthias est peut être douée mais ne fait pas de miracles quand même.

Tout au long de l'opération, je ne vois pas grand chose, rapport aux lunettes que je n'ai pas.Je fais confiance à Angélique Clémence ou Matthias. Je n'ai pas le choix. Je dois être une mauvaise cliente, je ne bavarde pas, trop angoissée à l'idée de la tête que j'aurai en sortant.

Et lorsque c'est terminé, à peine Angélique Clémence ou Matthias a le temps de me tendre le miroir pour voir comment je suis fabuleuse de dos, que d'une main je retire le peignoir-robe d'avocat, de l'autre je saisis mon sac et j'ai déjà quasiment un pied hors du salon.

Mais la dernière épreuve subsiste. Sans doute la plus douloureuse. Encore pire que l'épreuve démêlage, c'est dire. Le pourboire. En laisser ou pas. Combien. De la petite monnaie, ça fait quête à l'église. Un billet, vu le montant à 3 chiffres qu'on vient de débourser, ça fait beaucoup. Même si Angélique Clémence ou Matthias a complètement loupé ma coupe, je donne...enfin, des fois. Le pire, ce sont les salons où vous devez remettre le pourboire à Angélique Clémence ou Matthias, directement dans la poche, j'ai horreur de ça j'ai l'impression d'être une vieille rombière qui glisse un billet dans le slip d'un strip-teaseur.

 Et juste avant de quitter le salon, la question fatidique: ça vous plaît ?

Qui dit vraiment la vérité ?!! Je dis toujours oui oui, même si je file en vitesse sous la douche tout défaire. Patate.

 

Publié dans Pêle Mêle

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L
Quel réalisme ! C'est pour tout ça que je suis longtemps allée dans les chaines de salon de coiffure. Je ne connais personne, je lis tous les journaux que je n'achète jamais, je bois un café et je sors avec une coupe plus ou moins réussie. Et dès que j'arrive chez moi, je me lave la tête et je me coiffe comme je veux !<br /> Aujourd'hui, tout ceci est fini. Ma fille ainée est en école de coiffure et c'est elle qui me coupe les cheveux et fait les mèches. Tout a domicile, que du bonheur. Et elle, elle me fait vraiment ce que je lui demande !!!
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N
ça me rappelle un jour où j'ai refusé de sortir d'un salon tant que le (soi-disant) coiffeur ne m'avait pas remis la tête à l'endroit ! purééée, il m'a entendue le mec quand il a posé la question fatidique "ça vous plait ?"  je crois que c'est la goutte qui a fait déborder le vase ! je suis restée une heure de + jusqu'à ce que la catastrophe soit un peu réparée !! mais j'ai mis un mois avant de retrouver une tête normale ! maintenant que je suis "vieille", je gueule avant que ça ne me plaise pas :o) bisous my dear !
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F
Eh bien moi j'adore aller chez le coiffeur. C'est de la détente, je suis chouchoutée et quand je ressors j'ai le moral et plein d'énergie (et c'est le seul moment du mois où je suis bien coiffée dixit dh).J'ai de la chance j'ai une très bonne coiffeuse qui a trouvé ma coupe ma couleur. Je lui suis fidèle depuis 12 ans!<br /> Flo
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K
ihih, on dirait moi quand je vais chez le coupe tiff!Moi, ce que je préfère, c'est tendre l'oreille, et écouter les conversations autour de moi: la petite mamie qui raconte ses misères et la coiffeuse (la patronne) qui ne l'écoute pas et raconte sa vie... Des fois j'ai envie de me marrer, mais je suis trop polie et je me retiens!!!
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N
On s'y croirait, bravo pour ce reportage.
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